Enterrer ses morts et leur rendre visite

Enterrer ses morts et leur rendre visite … ou comment l’école a planté mes racines dans le ciel

En apprenant nos petits paragraphes sur la préhistoire, dès le primaire, c’était bien plus qu’une leçon : ils enterraient déjà leurs morts, ces hommes et ces femmes guère civilisés. Et c’est même à cela qu’on reconnaissait qu’ils étaient vraiment Hommes. Comme nous. Et lorsqu’ils n’enterraient pas encore leurs morts, ils n’étaient pas encore vraiment Hommes. Et si nous cessions d’enterrer nos morts, ne redescendrions-nous pas en dessous de l’homme préhistorique ? N’ayant plus alors l’intelligence du cœur pour s’incliner devant le mystère de la vie. Vous vous souvenez, vous les beaucerons, de la leçon de poésie, où Péguy méditait à son tour sur ce retour à la terre :

                   Heureux ceux qui sont morts, car ils sont retournés

                   Dans la première terre et le premier limon.

                   Ils sont redescendus dans le premier sillon

                   D’où le pouce de Dieu les avait défournés.

Heureux ceux qui sont morts, car ils sont retournés

Dans ce même limon d’où Dieu les réveilla.

Ils se sont rendormis dans cet alléluia

Qu’ils avaient désappris devant que d’être nés.

Merci ma chère école, tu n’as pas oublié me parler de ce qui fait que je suis Homme, et non pas simple quelconque mammifère, et tu m’as donné une clé pour la vie : prendre soin de ses morts. Et Victor Hugo prenait le relai pour évoquer cet appel intérieur, ce besoin de retrouver ceux que j’ai aimés et qui ont quitté cette vie, vous vous souvenez :

« Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne,

Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends. »

Ils m’attendent fidèlement (et pour cause !), ceux que j’ai aimés, lorsque je les visite au cimetière. Ils sont là, j’ai des racines dans cette terre, puisque c’est la glaise où sont enterrés ceux qui m’ont précédé. Le jour où l’on ne respecte plus les morts, il ne faut pas espérer qu’on respecte les vivants, et je suis fier de venir vous honorer, vous mes chers défunts. Et comme je suis croyant, je vous retrouve en venant prier pour vous et avec vous, et votre tombe me rappelle la grande Espérance qui est née du tombeau vide de Jésus Ressuscité, il y a deux mille ans. Oui je puise ma force dans des racines, dans une terre, et dans une Espérance ! Et cette terre où reposent ceux qui ont vécu ici avant moi m’est chère, et venir au cimetière rappelle ma destinée, ravive mon espérance, et renforce mes racines, me souvenant au bout du compte que, mes racines, sont au ciel !

Abbé Hugues de Tilly, curé de la paroisse de la Trinité

Article tiré dans « Jalons Bonne Nouvelle » d’Automne 2020.

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